Si de nombreuses jeunes filles vouent un culte à la minceur et se lancent dans des régimes parfois draconiens au moment de l’adolescence et si l’obésité gagne une grande partie de la population, il faut bien différencier cette envie de minceur pour plaire (à soi et aux autres) de ces troubles graves de l’alimentation que sont l’ anorexie et la boulimie.
De même, on accuse souvent les magazines et la mode de mettre l’anorexie au goût du jour. Mais bien avant que les magazines ne soient créés, l’anorexie sévissait : c’est au Moyen Âge que l’on trouve les premières descriptions d’anorexiques. Après en avoir longtemps cherché les causes, ce n’est que dans les années 1950 que l’on déterminera les origines psychologiques de ces problèmes.
Cela signifierait il que, dire que les magazines de mode et la publicité, longtemps montrés du doigt, seraient moins dommageables qu'on ne l'a longtemps cru ? Selon Howard Steiger, ils peuvent certainement jeter de l'huile sur le feu... à condition que ce dernier ait déjà été allumé par des prédispositions biologiques. « À eux seuls, les magazines peuvent donner envie de perdre des kilos, mais ils ne suffisent pas à déclencher l'anorexie ou la boulimie. »
L’anorexie et la boulimie peuvent sembler opposées et, pourtant, elles présentent de nombreux points communs et parfois même s’associent : on parle alors de boulérexie quand il y a alternance des deux troubles alimentaires.
L’anorexie mentale correspond à la volonté de maigrir alors même que le poids est normal ou déjà bas. Ce besoin est en rapport avec la peur de grossir et de devenir obèse. Peur de manger et amaigrissement massif en découlent.
L'anorexie mentale témoigne d'une anomalie inconsciente et profonde de l'équilibre affectif : théories sexuelles infantiles, refus inconscient d'être adulte. Elle survient volontiers à l'occasion d'un conflit familial, la perturbation de la relation avec la mère est caractéristique. Un intellectualisme à outrance est presque toujours associé.
La dénutrition va conduire à l’aménorrhée, à la bradycardie, à l’hypothermie, mais favorisera aussi les troubles digestifs (reflux gastro-oesophagien, ralentissement de la vidange gastrique, ballonnements abdominaux, constipation).
La peur pousse à l’hyperactivité physique, au trouble de l’image corporelle et au vomissement (par peur de regrossir) ou aux conduites obsessionnelles.
La restriction alimentaire favorise chez ces malades l’aménorrhée, les troubles digestifs (vidange gastrique ralentie, constipation), les troubles du caractère (angoisse, irritabilité), les troubles du sommeil, la sensation de puissance et les crises de compulsion alimentaire. Mais aussi le sentiment de maîtrise sans lequel l’anorexie mentale n’existe pas.
Il s’agit d’une maladie de la femme jeune en règle générale. Sa fréquence augmente : 1 à 1,5 % des femmes de 15 à 25 ans. La femme est touchée dans 95 % des cas. Elle touche actuellement toutes les classes sociales et tous les milieux.
Le diagnostic est facile : il ne requiert aucun examen complémentaire. Calculez l’indice de masse corporelle minimal (IMC = 18,5 ) ; proposez le à la malade comme objectif ; elle est terrifiée et elle refuse : elle a une anorexie mentale !
Il est essentiel de reconnaître 2 formes cliniques :
L’anorexie mentale restrictive pure: où l’amaigrissement n’est obtenu que par la restriction alimentaire et l’hyperactivité physiquE?le malade ne présente pas de crise de boulimie ou n’a pas recourt aux vomissements ou à la prise de purgatifs (laxatifs, diurétiques, lavements…).
L’anorexie mentale de forme boulimique, où face à ses difficultés (et pas seulement de maigrir) l’anorexique s’aide de vomissements. Dès lors, elle peut devenir la proie de crise de boulimie.
Comment reconnaître la forme boulimique. Les malades, qui en ont honte, cachent leurs vomissements et leurs crises de boulimie. Le diagnostic est facile : gonflement des glandes salivaires (parotides en tête), bouffissure relative du visage, oedèmes plus fréquents.
Biologiquement : hypokaliémie, hémoconcentration (protides et hémoglobine élevés), hypochlorémie, augmentation de la créatininémie, parfois hyponatrémie (potomanie pour vomir plus facilement).
Ces 2 formes cliniques ne partagent ni les mêmes signes ni le même pronostic.
Le traitement doit en être différent.
Tableau comparatif des formes restrictive et boulimique
Signes
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Forme restrictive
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Forme boulimique
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Visage et membres inférieurs oedématiés |
Peu ou pas
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Oui
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Hypokaliémie |
Peu ou pas
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Oui
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Sentiment dominant |
Toute puissance
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Honte et dégoût
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Etat dépressif |
Latent
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Souvent présent
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Sexualité |
Absente
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Normale, perturbée ou absente
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Hyperactivité physique |
Fréquente
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Plus rare
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Restriction alimentaire |
Féroce
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Plus variable
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Repas vrais |
Rares
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Variables
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Evolution |
Vers l’amaigrissement
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Vers la prise de poids, les crises de boulimie et la boulimie à poids normal
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Complications |
Celles de la dénutrition
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Hypokaliémie et suicide (rare)
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Pronostic |
Meilleur
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Moins bon
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Décès |
Rare : 1 % :
(si dénutrition traitée) |
Moins rare : 2 à 4 %
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Physiques |
Psychologiques |
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Sociales |
Économiques |
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Hyperactivité contrastant avec l'altération de l'état général, hyperinvestissement scolaire,
préparation des plats d'autrui ;
Idéal esthétique de la maigreur ;
Difficultés relationnelles majeures ;
Relations sociales pauvres ;
Vie sexuelle ou affective pauvre ou nulle...
Ils se caractérisent par un amaigrissement important (15 % du poids d’origine)accompagné d’une fonte musculaire. Parfois s’y associe un état dépressif ou un besoin permanent de boire.
On observe plusieurs signes associés chez les personnes souffrant d’anorexie qui peuvent apparaître de manière isolée ou combinée, en fonction de la gravité et de la durée de la maladie.
> Refus de maintenir un poids au niveau ou au-dessus d’un poids minimum normal par rapport à l’âge et à la taille.
> Peur intense de prendre du poids ou de devenir gros malgré une insuffisance pondérale.
> Altération de la perception du poids ou de la forme de son propre corps. Influence excessive du poids ou de la forme corporelle sur l’estime de soi, ou déni de la gravité de la maigreur actuelle et de la restriction alimentaire.
> Absence de règle pendant au moins trois cycles menstruels consécutifs chez les femmes menstruées.
(voir l'article sur les dangers)
Les manifestations somatiques qui accompagnent l'anorexie mentale sont :
(source : Société de Nutrition et de Diététique de Langue Française, 2001)
L’amaigrissement excessif peut aboutir à de graves carences nutritionnelles avec une perte de la masse musculaire.
Des troubles cardiaques, sanguins (baisse du potassium), de la thermorégulation, un déchaussement des dents et un affaiblissement du système immunitaire sont autant de complications. Lorsque l’indice de masse corporelle descend en-dessous de 13, la dénutrition est alarmante ; en-dessous de 11, le pronostic vital est en jeu.
En ce qui concerne les complications médicales de l'anorexie, la plus courante est l'aménorrhée (arrêt des règles). Il s'agit d'ailleurs d'un des diagnostic et de gravité du trouble mais cela fait débat. Certains auteurs le conçoivent comme une conséquence physiologique de la perte de poids, alors que d'autres voient une origine psychologique marquant le refus de la féminité.
Cet arrêt des règles peut provoquer, à long terme, des problèmes de croissance osseuse ainsi qu'une ostéoporose précoce.
Anorexie/Boulimie
L’anorexie est considérée comme le rejet à maintenir un poids normal. Pour cela les personnes utilisent différentes techniques du contrôle du corps. La boulimie est caractérisée comme l’alternance des conduites de voracité et des conduites de restriction alimentaire (jeûne, vomissement, médicaments purgatifs, exercice physique, etc.)
L’anorexie et la boulimie sont incluses comme troubles de la conduite alimentaire dans les catalogues des maladies mentales. Le DSM-IV établit deux sous-types d’anorexie :
anorexie restrictive où la perte de poids est le résultat de l’autocontrôle corporel sans recours aux vomissements et l’anorexie purgative où la perte de poids ne se produit pas sans le recours aux gavages et aux techniques purgatives et, en tout cas, aux techniques purgatives –si le gavage ne se produit pas: ainsi, la technique purgative peut succéder à des ingestions minimales de nourriture.
Dans ce qui concerne la boulimie, le DSM-IV établit aussi un sous-type purgatif (avec l’utilisation des vomissements et médicaments) et un sous-type non purgatif où les restrictions alimentaires ne s’accompagnent pas de vomissements.
La pression sociale
Anorexie mentale
Les signes de la maladie
L'anorexie est souvent masquée par les malades qui disent que l'appétit leur manque et qu'elles ont des nausées. Ce comportement contraste avec une activité physique normale.
L'anorexie mentale fait référence au refus d'une personne de s'alimenter - à l'exception parfois de petites quantités d'aliments particuliers - avec comme résultat une chute de poids qui peut être tellement importante qu'elle devient dangereuse pour la vie de la personne. Bien que la diminution de poids soit le signe le plus flagrant en matière d'anorexie, il ne s'agit pas du centre du problème. En effet, de nombreux individus sont, à l'heure actuelle, soucieux de perdre du poids pour des raisons esthétiques, médicale (ex. cancer) ou psychologique (ex. dépression). Ces raisons peuvent être précisées sans qu'un diagnostic d'anorexie soit toujours envisagé.
Si l'étymologie du mot anorexie fait référence à la perte d'appétit, l'origine du problème ne réside cependant pas dans l'absence de la sensation de faim. Loin d'avoir perdu l'appétit, la personne anorexique lutte d'une manière très active contre la sensation de faim, du moins au début, dans le but de ne pas prendre de poids et d'aspirer de plus en plus à un idéal de minceur. Après une certaine période de restrictions alimentaires, le corps s'adapte à cet état de manque et la sensation de faim s'apaise. Par la suite, les mécanismes biologiques de la faim et/ou de la satiété sont totalement déréglés.
De manière très spécifique, l'anorexie s'accompagne d'une peur intense "d'être gros(se)" et d'une poursuite incessante de maigreur. Ce trouble apparaît le plus souvent chez l'adolescente qui est et/ou se trouve trop grosse; elle commence, souvent approuvée par l'entourage, un régime qui, se révélant "efficace" au départ, se transforme en une préoccupation obsédante d'être sans cesse plus mince. Un exercice quotidien et intensif complète généralement le tableau des conduites alimentaires restrictives. Les préoccupations et les conduites alimentaires obsédantes liées à une volonté déterminée de maigrir encore et toujours plus, sont constamment présentes et n'abandonnent jamais l'anorexique, qui persévère dans son attitude, enivrée par la réussite de son programme et surtout par la capacité de contrôle qu'elle arrive à avoir sur son propre corps.
On distingue deux sous-types distincts lors du diagnostic d'anorexie mentale : le type "restrictif" et le type "compensatoire". La première catégorie concerne les anorexiques qui perdent du poids exclusivement à travers des restrictions caloriques sévères - voire à travers une non-alimentation quasi totale -, éventuellement accompagnées de moments d'exercice intensif. En ce qui concerne le second type - et c'est ce qui marque la différence avec l' "anorexie-boulimie" - des comportements compensatoires (vomissements provoqués, laxatifs ou exercicses physiques abusifs) répondent à l'ingestion de petites quantités de nourriture. Selon certaines études, la moitié des personnes anorexiques s'engage à un moment donné dans ce type de fonctionnement "compensatoire".
Quelles sont les causes ?
Elles sont multiples :
- Troubles psychologiques (perfectionnisme, volonté de contrôle, mauvaise estime de soi, traumatismes d’ordre sexuel, difficultés dans le mode des relations aux autres…).
- Environnement socio-culturel et familial (apologie sociétale de la minceur actuelle, problèmes de communication au sein de la famille, conflits affectifs…).
- Une cause héréditaire des troubles de conduites alimentaires est à l’étude.
Qui consulter ?
Un psychiatre aidé le plus souvent par un nutritionniste et un psychologue.
Quels sont les traitements ?
Le traitement repose sur un contrat de renutrition passé entre le psychiatre et le malade. Celui-ci est accompagné d’une psychothérapie individuelle et/ou familiale. C’est un long processus. En cas de dépression associée, des antidépresseurs sont prescrits.Dans les cas graves, l’hospitalisation peut être nécessaire pour réalimenter de force le malade dont le pronostic vital est en jeu.
Il est très important de souligner qu'il y a énormément de formes d'anorexie, de sortes d'anorexiques et que chaque anorexique est différent. Donc, il est déconseillé d'effectuer des amalgames, des parallèles et surtout ne pas penser qu'il puisse y avoir une seule façon radicale de soigner l'anorexie. Elle appartient à celui qui souffre et seul cet individu en connaît les tenants et les aboutissants. Donc à chaque anorexique son anorexie et à chaque anorexique son chemin vers la guérison, car même si certaines voies se rejoignent, les approches et le contenu en sont forcement différents puisqu'ils appartiennent au vécu de la personne qui souffre. Des enfants, des adolescents, des adultes, mais aussi des nourrissons peuvent être anorexiques et là nous sommes d'accord, qu'il ne s'agit pas d'une quelconque recherche d'un canon de mode ou de beauté, car , à tord, on a tendance à le croire. Non, l'anorexie est une souffrance qui se niche à n'importe quel âge, mais surtout pas par hasard et est un véritable parcours de souffrance pour celui qui le "subit". Elle est le plus souvent révélateur d'un mal-être familial. C'est d'ailleurs la raison pour laquelle, lorsqu'il y a anorexie, toute la famille doit être soignée.
L'anorexie est souvent une souffrance associée à la culpabilité de faire souffrir ses proches, mais aussi de se faire souffrir soi-même. La famille culpabilise et reproche à l'enfant ou l'être aimé de ne pas s'alimenter correctement.
Vient se mêler l'affectif, le désordre, le rejet, tout un processus qui engendre différents malaises qui s'accumulent et font que finalement, au devenir, tout tourne autour de cette nourriture, si chargée d'orgueil et de puissance aux yeux de chacun et pourtant si inutile aux yeux des souffrants.
Un manque, un deuil mal compris, mal gérer, une absence peuvent être révélateurs de l'installation du symptôme de l'anorexie. Un propre objectif de futur parent peut en être en ce sens rédempteur. Le détachement avec la mère, la renaissance d'un possible au travers d'une autre personne ( l'analyste dans un premier temps ) permettra peut-être à l'individu de trouver l'envie de ne plus affronter la vie, mais bel et bien de la vivre, tout simplement.
Une parole d'anorexique : "Ne plus être, ne plus devenir, pour enfin exister, souhaiter la disparition de son corps si inutile, si disgracieux, pour devenir une âme, un esprit."
le vouloir vivre en se détruisant. Le vouloir être invisible tout en se mettant en scène, ne plus pouvoir se regarder et pourtant se mirer pendant des heures en s'"auto-flagellant", le vouloir vivre à tous prix dans sa chaire en sentant la moindre veine, le moindre muscle se dé